La gestion de l’intérim présente des spécificités qui échappent souvent à la logique des systèmes ERP (Enterprise Resource Planning). L’ERP est une solution de gestion intégrée, permettant de piloter l’ensemble de processus d’une entreprise. Cependant la brique P2P (processus achat) est traditionnellement conçue pour gérer les achats de biens et services standards. Les ERP se heurtent donc à la complexité et à la flexibilité requises par l’achat de travail temporaire. Intégrer une solution de gestion de l’intérim dans un système d’achat de type ERP est toutefois possible avec la bonne solution technologique et le choix du bon processus associé. Il s’agit cependant d’une approche complexe, avec une triple transformation à mener, à la fois numérique (pour connecter les plateformes), organisationnelle (pour mettre à jour les processus) et humaine (pour accompagner le changement).
Le processus d’achat classique dans un ERP
Le processus d’achat classique au sein d’un système ERP de type SAP ou ORACLE, et de la brique P2P intégrée à ces solutions, est basé sur un mécanisme structuré et méthodique, crucial pour la gestion efficace des ressources et des dépenses d’une entreprise. Ce processus se décompose généralement en différentes étapes fondamentales, chacune jouant un rôle spécifique et essentiel dans la chaîne d’achat. Nous ne reviendrons pas ici sur les premières étapes de sélection des fournisseurs, établissements des catalogues, mais sur les étapes finales de passation de commande et réception de la livraison du service et de la facture associée.
La commande
La commande est l’étape initiale du processus d’achat vers les prestataires intérim. Elle représente l’acte formel par lequel l’entreprise confirme au fournisseur son engagement, en réponse aux propositions des fournisseurs, pour répondre à ses besoins spécifiés en termes de quantités et de type de produits ou services désirés. Cette étape formalise l’engagement d’achat et déclenche le processus logistique et financier associé.
Dans un ERP, la commande est souvent associée à un bon de commande, document officiel qui précise les détails de l’achat : références des articles, quantités, prix unitaires, conditions de livraison, etc. Ce document permet non seulement de communiquer clairement les attentes de l’entreprise au fournisseur, mais sert également de base pour la gestion budgétaire et comptable de l’achat. Il engage la dépense et est souvent rattaché à un centre de coût spécifique, facilitant ainsi le suivi et le contrôle des dépenses par l’entreprise.
La réception
La réception des biens ou services marque la deuxième étape du processus. C’est à ce moment que l’entreprise contrôle et valide la conformité de la livraison avec la commande initiale. Dans le cadre d’un ERP, la réception est souvent enregistrée via un bon de livraison qui confirme que les biens ou services ont été reçus et qui permet de mettre à jour l’inventaire de l’entreprise. Cette étape peut être simple ou complexe, selon la nature des biens ou services achetés. Elle peut nécessiter des vérifications qualitatives (conformité, état, fonctionnalité) et quantitatives (nombre d’articles, volumes). Dans certains cas, la réception peut être partielle, nécessitant alors des ajustements dans le système pour refléter les livraisons échelonnées.
La facture et le paiement
Une fois la réception des biens ou services confirmée, le fournisseur émet une facture, document comptable qui demande le paiement des biens ou services livrés. Dans l’ERP, cette facture est soigneusement contrôlée pour s’assurer qu’elle corresponde aux termes de la commande et de la réception. Une fois la facture validée, au travers de l’ERP le client procède au paiement du fournisseur, clôturant ainsi le cycle d’achat. Cette étape est également l’occasion pour l’entreprise de vérifier que les conditions de paiement (délais, escomptes éventuels, pénalités…) sont bien respectées et que l’ensemble du processus est en conformité avec les politiques d’achat et les normes comptables de l’entreprise.
L’entreprise peut ensuite dans son ERP, en complément de la gestion de ses paiements, gérer sa comptabilité générale, sa comptabilité analytique, son fichier des écritures comptables, sa déclaration de TVA et sa comptabilité auxiliaire.
Ce processus d’achat dans un ERP convient parfaitement pour les achats dits « catalogués » (quantité multipliée par un tarif unitaire catalogue) comme par exemple les achats de matières premières, produits et biens de consommation, fournitures, énergie, etc. Toutefois, quand il s’agit « d’acheter » de la prestation de type travail temporaire, les choses se compliquent considérablement.
L’achat de travail temporaire
L’achat de travail temporaire présente des particularités qui le distinguent nettement du processus d’achat classique. Ces spécificités découlent principalement de la nature variable et souvent imprévisible des services fournis dans le cadre du travail temporaire.
La commande
Dans le contexte de l’achat de travail temporaire, l’étape de commande diverge significativement d’un bien ou service traditionnel. Contrairement à une commande standard où les quantités et les prix sont fixes et prédéfinis, la commande de travail temporaire intègre des éléments variables et souvent inconnus au moment de la commande. Par exemple, un travailleur temporaire peut être amené à effectuer des heures supplémentaires, ou à l’inverse, être absent, modifiant ainsi la charge de travail réellement effectuée. De plus, les primes et indemnités, telles que celles consécutives aux intempéries ou les repas, ne sont pas systématiques et dépendent de multiples conditions, rendant leur prévision difficile.
Le contrat de mise à disposition
Pour le recours à l’intérim, il est nécessaire de signer bilatéralement un contrat dénommé contrat de mise à disposition (CMAD). Ce contrat définit juridiquement et financièrement les conditions de délégation de personnel intérimaire pour l’entreprise utilisatrice et doit respecter différentes contraintes légales et comporter des mentions décrivant précisément certains aspects (motif de recours, coefficient de facturation, taux horaire, contraintes du postes, etc.). Ce document qui regroupe des informations de type durée, type de contrat, motif de recours, et salaire horaire fait foi pour l’ensemble de la prestation délivrée. Ce type de document, en lien avec le droit du travail, n’existe pas dans les ERP, alors même qu’il est au cœur de la relation client-fournisseur dans un processus de recours à l’intérim. Il est donc nécessaire, pour respecter la législation et sécuriser le processus de recours, d’intégrer une brique dédiée capable de répondre à de tels enjeux très spécifiques.
La réception
La réception, dans le cadre du travail temporaire, ne se résume pas à la vérification de biens physiques, ou même à la seule présence de l’intérimaire. De façon beaucoup plus précise, la réception est validée par la saisie et la transmission au prestataire, d’informations relatives à l’activité réelle de l’intérimaire. Cette étape implique la gestion des présences, des heures travaillées et des éventuelles particularités (absences, heures supplémentaires, etc.). Ces informations doivent être collectées et traitées de manière dynamique, car elles influent directement sur la facturation. La réception est donc un processus continu et interactif, nécessitant une mise à jour régulière et précise des données pour refléter la réalité de la prestation réalisée. Il convient aussi de noter que ces mêmes informations déterminent la rémunération de l’intérimaire, et se doivent donc d’être justes et précises.
La facture et le paiement
La facturation dans le cadre du travail temporaire est intrinsèquement liée aux données recueillies lors de la réception, et diffère ainsi d’une facture standard, par sa nature variable vis-à-vis de la commande initiale. Les montants facturés reflètent les heures travaillées, les primes accordées, et peuvent être influencés par des facteurs externes tels que des négociations salariales ou des changements réglementaires (c’est par exemple le cas avec la hausse du SMIC). Contrôler les éléments facturés, et maîtriser cette variabilité quasi systématique implique la nécessité d’un calcul préalable (préfacturation) servant ensuite à comparer la « vision client » avec la « vision fournisseur ». Le paiement, finalisant l’achat, doit également s’adapter à cette flexibilité, prenant en compte les ajustements et les validations nécessaires pour garantir l’exactitude des montants réglés.
Les différents types de scénarii d’intégration
Une plateforme de gestion de l’intérim (VMS) peut être intégrée à votre processus d’achat P2P et à votre ERP. Des interfaces ou des connecteurs permettent la communication entre votre ERP et la solution de gestion de l’intérim choisie. Les données doivent pouvoir être échangées de manière fluide et sécurisée entre les deux systèmes. Le VMS retenu doit être compatible avec votre infrastructure technologique et offrir les fonctionnalités nécessaires pour répondre à vos besoins. Il est alors possible de configurer la solution de gestion de l’intérim selon les besoins spécifiques de votre entreprise et de votre ERP. Cela peut inclure la définition des circuits de validations, des autorisations d’accès, etc.
L’intégration de la gestion de l’intérim dans un ERP nécessite la considération de différents scénarii d’achat, chacun adapté à la nature unique et flexible du travail temporaire. Ces scénarii varient en fonction de la manière dont les commandes sont passées, gérées et facturées dans le système ERP. Exemples :
- Le schéma court : il vise à minimiser les écarts entre la commande initiale et le montant final facturé. Dans ce scénario, la commande est créée en se basant sur la préfacturation, une estimation anticipée des coûts basée sur les heures de travail prévues et les autres variables connues à l’avance. Cette méthode permet une plus grande précision dans la gestion des coûts, car elle adapte la commande aux conditions réelles de la mission d’intérim. Cependant, cette approche nécessite une mise à jour constante et un suivi attentif des heures travaillées et des coûts supplémentaires, ce qui peut se révéler complexe et chronophage.
- Le schéma commande unitaire : ici, chaque mission d’intérim génère une commande distincte dans l’ERP. Cette méthode permet un suivi détaillé et individuel de chaque mission, facilitant la traçabilité et le rapprochement entre la commande, la livraison et la facturation. Toutefois, ce scénario peut entraîner une augmentation significative du volume administratif, avec une multiplication des commandes, des factures, et des interactions nécessaires entre le client et le fournisseur.
- Le schéma commande globale : dans ce modèle, l’ERP gère une commande ouverte pour l’intérim, ajustant le montant de cette commande au fur et à mesure de la réception des factures. Ce processus permet une plus grande souplesse et une meilleure gestion des variations inhérentes au travail temporaire. La commande globale est régulièrement ajustée en fonction des factures réceptionnées et contrôlées, permettant ainsi un suivi en continu des dépenses tout en limitant le volume administratif. Cette approche nécessite toutefois un système ERP suffisamment flexible et dynamique pour gérer ces ajustements en temps réel.
L’œil de PIXID
Pour intégrer une brique intérim dans un système d’achat, il existe différentes méthodes. Le client aura le choix en fonction de son contexte et de ses impératifs internes de s’orienter vers l’une ou l’autre, selon ses besoins et son infrastructure technique. Ce qui compte, c’est de comprendre et d’intégrer les spécificités de l’intérim dans son processus d’achat pour travailler plus efficacement, de déterminer ensuite les flux de données nécessaires entre PIXID et l’ERP (sa brique P2P mais éventuellement aussi SIRH). Cela inclura donc des informations sur les intérimaires, les contrats, les factures, les commandes d’achat, etc. Configurez les mappings de données pour assurer une synchronisation précise entre les deux systèmes et effectuez des tests approfondis pour vous assurer que l’intégration fonctionne correctement.